LES ANTALGIQUES

Auteur : Sandrine BAGEL-BOITHIAS Pharmacien assistant CHU de Clermont-Ferrand

Document proposé le 11/06/03 en Power Point, graphiquement simplifié pour être présenté sur le site, en téléchargement rapide.

GÉNÉRALITÉS SUR LA DOULEUR

La douleur est une maladie chronique dont la seule « vertu » est représentée par sa fonction d’alarme. Un traitement antalgique doit être proposé simultanément au traitement étiologique de toute pathologie douloureuse

Dès sa naissance, l’enfant est susceptible de ressentir la douleur. 
obligations éthiques et légales à soulager cette douleur

DÉFINITIONS : DOULEUR et ANTALGIQUES

La douleur est une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable liée à une lésion tissulaire réelle ou potentielle

Les antalgiques sont des médicaments capables de diminuer voire d’abolir la perception des sensations douloureuses sans entraîner de perte de conscience

TRANSMISSION DE LA DOULEUR

Perception de la douleur au niveau des récepteurs (cutanés, viscéraux, musculaires…)
« Passage » du message douloureux
-par la corne postérieure de la moelle - par le bulbe rachidien - par la substance grise périaqueducale
- par le thalamus, Intégration du message douloureux au niveau du cortex

_
Stimulation d'intensité croissante -> Nocicepteurs = récepteurs sensitifs

Fibres A-alpha et A-bêta Myélinisées, gros Ø Conduction rapide : 
réponse sensitive

Fibres A-delta myélinisées ; Fibres C non myélinisées Petit Ø Conduction lente : 
réponse algique

STIMULIS DOULOUREUX: agression thermique, chimique, mécanique

augmentation du potassium intracellulaire (antagonisés par anesthésiques locaux)

Lésion tissulaire ( POTASSIUM, PROSTAGLANDINES et DOULEUR )

Libération de médiateurs:
Bradykinine, histamine 
sérotonine, acétylcholine, (antagonisés par antidépresseurs)
PG, leucotriènes (antagonisés par AINS et Salicylés)

LES GRANDES RÈGLES D’UN TRAITEMENT ANTALGIQUE

1- Privilégier la voie d’administration la plus simple possible, en évitant au maximum les voies IM et SC itératives

2- le traitement d’une douleur doit prévenir sa réapparition: prescription à horaires fixes de doses suffisantes auxquelles peuvent s’ajouter des compléments

3- l’utilisation de co-antalgiques est recommandée à chaque niveau de l’échelle antalgique OMS

4- il faut rechercher et prévenir les effets secondaires iatrogènes

RÈGLES GÉNÉRALES RELATIVES A LA PRISE EN CHARGE DE LA DOULEUR

1er objectif: diminuer l’intensité de la douleur de façon à permettre un retour aux activités de bases

2eme objectif: Adapter rapidement le traitement en fonction du niveau de la douleur résiduelle, grâce à une ré-évaluation après une ou deux prises d’antalgique

RÔLE DES SOIGNANTS DANS LA RÉUSSITE D’UN TRAITEMENT ANTALGIQUE

Expliquer les plans de prise 
horaires fixes en fonction de la ½ vie du produit
doses fixes : Éviter sous dosage

RÉAPPARITION DOULEUR d'où AUTOMÉDICATION
Puis ACCIDENTS

Donc
Expliquer les ordonnances :
Effets attendus: quand?
Effets secondaires: lesquels

CRITÈRES DE CHOIX DES ANTALGIQUES

Selon une évaluation 1-10 de la douleur (EVA)

si douleur légère (1 à 3cm) 
-> antalgique de palier 1 en 1ère intention 

si douleur moyenne (4 à 7 cm)
-> antalgique de palier 2 en 1ère intention 

si douleur intense ou très intense (>7cm)
-> antalgique de palier 3 en 1ère intention 

-> Choix thérapeutique fonction de l’intensité douleur,
non du diagnostic et encore moins du pronostic


CHOIX DES ANTALGIQUES DE PALIER I

Tout type +/- fièvre
Paracétamol
Ibuprofène
Aspirine

articulaires, rhumatismales
Diclofénac VOLTARENE
Naproxène APRANAX

ORL et stomatologiques
Ac. Niflumique NIFLURIL
Ac tiaprofénique SURGAM

Ces deux derniers antalgiques s'emploient aussi pour
les douleurs articulaires, rhumatismales

ANTALGIQUES DE PALIER I: le PARACÉTAMOL

Seul antipyrétique utilisable dès la naissance
Mécanisme d’action mal connu

-Absorption gastrique rapide
plus rapide que absorption rectale
- Faible fixation aux Protéines Plasmatiques
- Métabolisme hépatique saturable
Attention au SURDOSAGE
- ½ vie de 2 à 3 h
- Élimination urinaire

Excellente tolérance aux doses thérapeutiques
-Rares manifestations cutanées
- Thrombopénies très rares

Intoxication aiguë à partir d’une dose unique de 120mg/kg
Période asymptomatique (3 à 4jours)
Puis Cytolyse hépatique
traitement par N acétyl cystéine Voie IV

Conseils

Multiplicité des conditionnements et des spécialités
-> Favorise l’utilisation simultanée de plusieurs spécialités

Goût plutôt agréable des formes orales
Attention aux intoxications accidentelles
Rester dans les mêmes « gammes »
Privilégier les conditionnements sécuritaires

ANTALGIQUES DE PALIER I: PERFALGAN 

Remplace le propacétamol PRODAFALGAN
Réservé à l’adulte et l’enfant de plus de 33kg (11 ans)

Utilisation sure et largement répandue
Très utilisé en post opératoire

Remarque: Si le dispositif de transfert n’est pas utilisable,
il faut prendre des gants car le produit est allergisant

Effet antalgique
- obtenu 5 à 10minutes après l’administration
dure jusqu’à la 6ieme heure

Posologie 
adulte: 1g par administration
Enfant: 15mg/kg par administration

1. administration en perfusion de 15 minutes

2. Ne pas mélanger avec d’autres médicaments dans la perfusion

ANTALGIQUES DE PALIER II: CODÉINE

Palier II utilisable chez l’enfant de plus de 1 an 
( en Suisse, PARACODIN utilisable dès 4mois)

Codéine (10%)
-> Cytochrome polymorphe génétiquement
-> Morphine
= Grande variabilité individuelle de la réponse analgésique

Synergie d’action avec le paracétamol

CODENFAN: présentation et posologie

Flacon de 200ml muni d’un bouchon de sécurité
1mg/kg/prise toutes les 4 heures
sans dépasser 6 prises/jour

L’absorption d’une partie du flacon par un enfant peut
entraîner des conséquences très graves voire létales

CODEINE: effets secondaires et toxicité

Aux doses thérapeutiques
Somnolence
Constipation 
Nausées
Vomissements 
Éruptions cutanées

Si doses >2mg/kg en prise unique
Majoration de tous les effets secondaires plus
Myosis 
Œdème du visage
Ataxie
Risque de dépression respiratoire (dans les 15h)
=> HOSPITALISATION 

L’effet antalgique apparaît 20 minutes après la prise.
Il est maximum 1 à 2 heures après administration et
dure environ 4 à 5 heures

Il est indiqué dans les douleurs moyennes bénignes ou malignes type:
brûlure superficielle et localisée
Gingivo-stomatite

Et en première intention après certains actes tels
une amygdalectomie (pendant 72 heures)
Une circoncision ou un traitement de phimosis

ANTALGIQUES DE PALIER II: NUBAIN

La nalbuphine NUBAIN est un agoniste antagoniste
de puissance analgésique 2 fois moindre que la morphine

C’est l’analgésique morphinomimétique le plus utilisé
chez l’enfant après 18 mois ventilant spontanément.

ATTENTION
Sa faible puissance analgésique et son effet plafond
doivent faire réserver son utilisation aux
douleurs d’intensité MOYENNE et non aux fortes douleurs

Remarque: association possible au paracétamol ou AINS


AMM à partir de 18 mois, mais utilisation
en pratique bien avant (chez le nouveau né)

LE NUBAIN est indiqué:
en chirurgie, pour les douleurs postopératoires, les pansements
En médecine, pour des brûlures, des fractures, des sutures de plaies

Il faudra veiller à bien ré-évaluer la douleur du patient
passées les premières minutes de sédation qu’entraîne le NUBAIN.
L’antalgie peut alors s’avérer insuffisante.

ANTALGIQUES DE PALIER II: TEMGESIC

Utilisable à partir de 7 ans
Glossette à laisser fondre sous la langue

Affinité +++ pour les récepteurs à la morphine
-> Annule l’effet de la morphine pendant plusieurs heures

Délai d’action : 15 minutes à 2 heures
Durée d’action de 8 à 10 heures

Avantages
1 à 2 prises par jour (nuit tranquille)
Utilisable même en cas de difficulté à déglutir
+ absence du mot « morphine »

Inconvénients
Nausées et vomissements +++
Effet plafond
Réglementation, législation 

AUTRES ANTALGIQUES DE PALIER II

Néfopam ACUPAN

à partir de 15 ans
Utilisation par voie IM ou IV lente
- Administrer chez un sujet couché par
IM profonde ou IV lente (>5 minutes)
- Délai d’action : 15 minutes à 30 minutes
Durée d’action de 3 à 6 heures

Dextropropoxyphène à partir de 15 ans

ANTALVIC ou DIANTALVIC (+ paracétamol)
- Attention au risque d’hypoglycémie parfois sévère avec ce produit +++
- Peut fausser le dosage de la glycémie si
utilisation de la méthode à la glucose oxydase péroxydase

ANTALGIQUES DE PALIER III: MORPHINE (Analgésique de référence)

Probablement insuffisamment prescrite car:
- Réticences médicales encore nombreuses
frein représenté par les contraintes administratives

Ex: morphine orale -> 4 semaines maxi en France
-> 13 semaines en Angleterre

Néanmoins, consommation de morphine multipliée par 12 ces 10 dernières années

MORPHINE: mécanisme d’action et effets II

Sur le SNC
* Action inhibitrice
Somnolence
Dépression respiratoire
* Action excitatrice
Nausées, vomissements
P intracrânienne
Myosis

Actions périphériques
Contraction gastrique? spasme du pylore
-> Ondes péristaltiques intestinales et 
-> Sécrétions digestives -> constipation

Libération d’hormones
ADH -> diurèse diminuée
catécholamines -> hyperglycémie
histamine -> prurit

MORPHINE: conseils pratiques

* A propos de la constipation
Hydratation abondante
Régime riche en fibres
Si échec, laxatifs doux per os 
(voie rectale en dernier recours)
* A propos de la somnolence
Cède en quelques jours, à la poursuite du traitement
Probablement pas due à la morphine mais
au retard de sommeil perturbé jusqu’alors par la douleur

Formes galéniques

* Chlorhydrate : Durée d’action de 4 heures
Injectable : 0,5mg/kg/jour
Per os : 1mg/kg/jour

* Sulfate : Durée d’action de 12 heures
Per os : MOSCONTIN 10, SKENAN 10 +++
A partir de 6 mois

Titration = détermination de la quantité minimale

de principe actif soulageant le malade
Normalement titration avec une forme orale de
morphine à libération immédiate, type sirop dosé à 0,5 - 1 ou 2mg/ml:
posologie initiale de 0,2mg/kg toutes les 4h
si insuffisant, administration toutes les heures de 0,1mg/kg complémentaires

Dans le cas de douleurs chroniques sévères,
la posologie moyenne est de 3 à 4mg/kg/jour.
Elle peut atteindre 15mg/kg/jour.

Passage à des formes retards:
calculer la dose (en mg) de morphine
reçue dans les 24 dernières heures.
La diviser par 2 et donner cette dose toutes les 2 heures.
Attention à maintenir une dose de morphine
immédiate lors de la première prise de morphine LP

Pour les patchs:
s’ils sont utilisés en relais de morphine orale,
on convertit l’équivalent morphine orale
sur les dernières 24 heures en équivalent fentanyl transdermique
si pas de morphine au préalable, il faut commencer par les patchs de 25µg/h

AUTRES ANTALGIQUES DE PALIER III

Péthidine DOLOSAL

Indication très spécifique en oncohématologie
dans les douleurs d’origine viscérale car elle est:
Spasmolytique
Moins constipante que la morphine

ANTALGIQUES DE PALIER III: fentanyl

Dérivé synthétique 100 fois plus puissant que la morphine
Existe sous différentes formes galéniques intéressantes:
IV (délai d’action court (2’) et durée courte (30’)

Patch à laisser 3 jours en place: DUROGESIC
Comprimé à sucer ACTIQ (sous ATU)
Les deux dernières formes ne sont
pas utilisables chez l’enfant de moins de 15 ans.

POUR TORDRE LE COU AUX IDÉES REÇUES

+ La morphine est l’antalgique universel
- Marche bien dans les douleurs nociceptives,
mais mal dans les douleurs neurogènes

+ La morphine est synonyme de fin de vie
- Le choix thérapeutique est fonction
de l’intensité de la douleur et non de la gravité de la maladie

+ Mon enfant va devenir « accro »
- Pas d’effet toxicomanogène quand il y a douleur

LES CO-ANTALGIQUES: les ANTIDÉPRESSEURS

L’effet antalgique n’est pas lié à l’humeur
Efficacité dans le traitement de la douleur 
- avec un délai d’action plus rapide 
- à des posologies inférieures à celles utilisées en psychiatrie

Action sur la composante de fond de la douleur neurogène:
Utilisation dans les douleurs néoplasiques rebelles,
dans certaines douleurs rhumatologiques

Exemple: 
Amitriptyline LAROXYL: 1mg/kg/jour chez l’enfant
clomipramine ANAFRANIL

Action sur l’hyper-excitabilité des membranes excitables.

Efficacité sur la composante paroxystique 
des douleurs neurogènes

Exemple: 
clonazépam RIVOTRIL: 0,1mg/kg/jour chez l’enfant
lamotrigine LAMICTAL
gabapentine NEURONTIN

LES CO-ANTALGIQUES: les ANTISPASMODIQUES

Pas de propriétés antalgiques propres
mais action sur les manifestations spasmodiques des atteintes viscérales:
troubles fonctionnels du TD, du système urinaire…

Exemple: 
Tiémonium VISCERALGINE (suppo)
phloroglucinol SPASFON (lyoc)
trimébutine DEBRIDAT (sirop)

AUTRES MOYENS THERAPEUTIQUES

Techniques de neurostimulation
Elles renforcent le contrôle inhibiteur physiologique médullaire
de la nociception exercée par les fibres de gros diamètres.
Envoi d’un courant électrique de faible intensité
grâce à des électrodes placées sur la peau ou au contact des cordons postérieurs.
Les séances durent environ 30 minutes à 1 heure.

AUTRES ANTALGIQUES…

* Les sucettes
Bonne antalgie conférée par la succion d’une sucette
Baisse temps pleurs
Baisse agitation
Contient l'élévation FC

* Les solutions sucrées De saccharose ou De glucose à 30%
A utiliser 2 minutes avant un geste traumatique

A utiliser avant et pendant tout geste douloureux
Synergie d’action des 2 procédés

entrée du site