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Auteur : Sandrine BAGEL-BOITHIAS
Pharmacien assistant CHU de Clermont-Ferrand
Document déposé le 1er octobre 2003, Créé en juin 2003 |
-
aujourd’hui
la famille des AINS compte plus de 60
composés actifs entrant dans pas moins de 300 spécialités environ
-
chaque
jour dans le monde, au moins 30 millions de personnes prennent un AINS
-
aux
Etats Unis, les AINS sont responsables d’environ 70 000 hospitalisations et de 7 000 décès
-
la
découverte de leur mécanisme d’action ne date que de 1971, alors que certains
d’entre eux sont utilisés depuis plus de un siècle
-
la
plupart possède à la fois des propriétés anti-inflammatoire, antalgique,
antipyrétique, et parfois antiagrégante.
Au
cours de la réaction inflammatoire, les phospholipides membranaires sont dégradés
en acide arachidonique sous l’action de la phospholipase A2.
L’acide
arachidonique va donner naissance :
-
sous
l’action de la lipo-oxygénase, aux leucotriènes
-
sous
l’action des cyclo-oxygénase aux prostaglandines
|
PHOSPHOLIPIDES MEMBRANAIRES |
|
|||||||||
|
|
ò |
|
||||||||
|
Phospholipase
A2à |
ß INFLAMMATION |
|||||||||
|
|
|
|||||||||
|
Acide arachidonique
|
|
|||||||||
|
ò |
|
ò |
|
|||||||
|
COX 1
Isoforme constitutif |
ï |
|
ð |
COX
2
Isoforme inductible |
|
|
||||
AINS classiques |
ï |
Célécoxib Rofécoxib |
|||||||||
|
|
|
|||||||||
|
ò |
|
ò |
|
|||||||
|
PROSTAGLANDINES
THROMBOXANE
A2 |
|
|||||||||
|
ò |
|
ò |
|
|||||||
Homéostasie++ Cytoprotection de la
muqueuse gastrique Equilibre de l’hémostase
primaire Régulation de la fonction
rénale |
|
Douleur, fièvre,
inflammation+++ Prolifération cellulaire Réparation tissulaire Régulation : rein,
ovulation, ischémie |
|||||||||
|
|||||||||||
|
|||||||||||
1.
Rappel
sur les prostaglandines
-
dans les situations inflammatoires, la
plupart des prostaglandines participent à la prolifération lymphocytaire, à l’activation des macrophages et des
cellules cytostatiques et au chimiotactisme des leucocytes
-
en
cas de lésions tissulaires, elles participent également à la génèse et à l’entretien de la douleur en augmentant
la sensibilité des nocicepteurs.
Physiologiquement :
-
au
niveau le l’estomac, les prostaglandines synthétisées par la COX-1 sont
cytoprotectrices
-
au
niveau rénal, les PG jouent un rôle relativement faible lorsque le rein
fonctionne normalement. Par contre, en situation d’hypoperfusion, elles
augmentent la filtration glomérulaire
-
au
niveau bronchique, l’inhibition de la COX-1 entraînerait une déviation du
métabolisme de l’acide arachidonique vers la synthèse des leucotriènes qui sont
de puissants médiateurs de l’asthme
-
au
niveau des plaquettes, seule la COX-1 est présente
2.
Rappels
sur les COX
La
COX-1 est constitutive dans :
-
l’estomac
-
les
intestins
-
les
reins
-
les
plaquettes
La
COX-2, en l’absence de stimulus inflammatoire, s’exprime uniquement dans :
-
le
cerveau
-
la
moelle épinière
-
le
rein
-
certaines
cellules tumorales
La
COX-2 est inhibée par les corticoïdes alors que la COX-1 ne l’est pas
|
COX-1 |
COX-2 |
Gène |
Chromosome 2 ou 9 |
Chromosome 1 |
Différences |
Insensible
aux glucocorticoïdes |
Inhibée par
les glucocorticoïdes |
Régulation |
Constitutive
|
Inductible |
Expression
tissulaire |
Tous les
tissus en particulier : Plaquettes Estomac Rein |
Induite par
les stimuli inflammatoires et mitogènes et produites dans les macrophages,
les monocytes, les cellules endothéliales… |
Constitutive
dans le cerveau, la moelle épinière, le rein |
3.
Mécanisme
d’action des AINS
Les
AINS sont des inhibiteurs compétitifs des COX. Ils bloquent la synthèse des prostaglandines
en se liant au site actif de l’enzyme et en inhibant son activité oxygénasique.
Il
en résulte une diminution de la production de toutes les prostaglandines et du
thromboxane A2.
C’est
le rôle multiple des prostaglandines qui explique d’une part les indications
variées des AINS mais aussi la variété de leurs effets indésirables.
Les
AINS diminuent la fièvre quelle qu’en soit l’origine, en entravant la synthèse
des prostaglandines pyrogènes induites par des cytokines (Il1) dans le
centre hypothalamique de thermorégulation
Elle
s’exprime dès les faibles posologies. Les AINS agissent sur toutes les douleurs
par excès de nociception où les prostaglandines interviennent en sensibilisant
les nocicepteurs aux médiateurs algogènes libérés par les lésions tissulaires.
Les
AINS s’opposent surtout à la composante vasculaire de la réaction inflammatoire
responsable de la tétrade « œdème, douleur, chaleur, rougeur ».
L’action anti-inflammatoire s’exerce à des posologies plus élevées que pour
l’action antalgique.
Tous
les AINS sauf les coxibs perturbent les tests d’agrégation plaquettaire.
Néanmoins, seule l’aspirine, qui inhibe de façon irréversible la COX-1 des
plaquettes possède une réelle activité antiagrégante.
On
scinde les AINS en 9 familles chimiques : cette classification a pour
avantage d’éviter la prescription ultérieure d’un dérivé e la même famille en cas d’allergie vraie à l’un d’entre eux.
Mais cette classification ne tient pas compte de l’hétérogénéité du rapport
bénéfice risque au sein d’une même famille.
Famille chimique |
DCI |
Spécialités |
Liste |
Anti-inflam |
Antal gique |
Anti-pyrét |
Anti- agrég |
Salicylés |
Acide
acétylsalicylique |
ASPIRINE®
|
Æ |
+ |
+ |
+ |
++ |
Acétylsalicylate de
lysine |
ASPEGIC® |
Æ |
+ |
+ |
+ |
++ |
|
Bénorylate |
|
|
- |
+ |
+ |
++ |
|
Carbasalate |
solupsan® |
Æ |
+ |
+ |
+ |
++ |
|
Diflunisal |
dolobis® |
II |
+ |
++ |
- |
+/- |
|
Alkanone |
Nabumétone |
nabucox® |
I |
+ |
+ |
+ |
+ |
Arylacétate |
Diclofénac |
voltarene® |
II |
+ |
+ |
+ |
+/- |
Aryl-propionique |
Ac tiaprofénique |
surgam® |
II |
+ |
+ |
+ |
+ |
Fénoprofène |
nalgesic® |
II |
+ |
+ |
+ |
|
|
Flurbiprofène |
cebutid® |
II |
+ |
+ |
+ |
+ |
|
Alminoprofène |
Minalfene® |
ii |
+ |
+ |
+ |
+ |
|
Iburprofène |
nurofen® |
Æ |
+ |
+ |
+ |
+/- |
|
Kétoprofène |
profenid® |
ii
|
+ |
+ |
+ |
+/- |
|
Naproxène |
naprosyne® |
ii |
+ |
+ |
+ |
+ |
|
Fénamates |
Ac. méfénamique |
ponstyl® |
ii |
+ |
+ |
+/- |
|
Ac. nifumique |
nifluril® |
ii |
+ |
+ |
+/- |
+/- |
|
Indolés |
Etodolac |
lodine® |
ii |
+ |
+ |
+ |
+ |
Indométacine |
indocid® |
i |
++ |
+ |
+/- |
+/- |
|
Sulindac |
arthrocine® |
i |
++ |
+ |
+ |
+ |
|
Oxicams
|
Méloxicam |
mobic® |
i |
++ |
+ |
+ |
+ |
Piroxicam |
feldene® |
i |
++ |
+ |
+ |
+ |
|
Ténoxicam |
tilcotil® |
i |
++ |
+ |
+ |
+ |
|
Pyrazolés |
Phénylbutazone |
butazolidine |
i |
++ |
+/- |
+ |
+ |
Inhibiteurs
de la COX-2 |
Célécoxib |
celebrex® |
i |
+ |
+ |
+ |
- |
Rofécoxib |
vioxx® |
i |
+ |
+ |
+ |
- |
ð Absorption
variable suivant les voies d’administration :
-
quasi
complète par voie orale, plus rapide à jeun que pendant le repas
-
moins
rapide et moins régulière par voie rectale
-
bonne
par voie IM chez l’adulte jeune
ð Fixation à 95% à l’albumine, fixation susceptible
d’entraîner des interactions
ð Bonne
diffusion tissulaire, y compris à travers la barrière hémato-encéphalique, le
placenta et le lait maternel
ð Métabolisme
hépatique
ð Elimination
urinaire parfois en compétition avec des métabolites endogènes (acide urique),
ou exogènes (méthotrexate, lithium)
ð ½ vie
variable suivant les produits : un fractionnement des doses journalières
est souvent souhaitable pour réduire les troubles fonctionnels digestifs
Qu’ils
soient administrés par voie orale ou parentérale, tous les AINS exposent
virtuellement aux mêmes types d’effets secondaires :
1.
effets
indésirables digestifs
Il
faut distinguer :
-
les
manifestations purement fonctionnelles : nausées, anorexie,
gastralgie, dyspepsie, très fréquente (> 20%) et communes à tous les AINS
-
les
ulcérations et ulcères gastro-duodénaux, asymptomatiques dans la moitié
des cas
-
la
maladie ulcéreuse (hémorragie, perforation gastro-intestinale) bien plus
rares dont les AINS n’augment l’incidence dans la population générale que de 3
à 5. il existe un certain nombre de circonstances pré-disposantes : grand
age, prise simultanée de corticoïde ou d’anticoagulant.
2.
réactions
cutanéomuqueuses
D’origine
allergique, elles se manifestent par :
-
un
prurit, des éruptions urticariennes
-
une
stomatite, rhinite voire un bronchospasme
-
exceptionnellement
par un œdème de Quincke ou un choc anaphylactique
3.
complications
rénovasculaires
-
rétention
hydrosodée se manifestant par des oedèmes des membres inférieurs et
une augmentation de la PA : de manière précoce et assez fréquente,
favorisée par une hypoperfusion rénale
-
rares
hyperkaliémie
4.
manifestations
neurosensorielles
-
céphalées,
vertiges, accouphènes, surtout avec l’indométacine, et lors d’un surdosage en
aspirine (« salicylisme »)
-
troubles
du sommeil et du comportement chez le sujet agé
5.
complications
gynéco-obstétricales
-
action
tocolytique augmentant la durée de la gestation et le travail
-
fermeture
prématurée du canal artériel et insuffisance rénale chez le bébé dont la mère
aurait été traitée par AINS au dernier trimestre de grossesse.
Remarque : concernant
l’ensemble des effets secondaires, diverses études ont montré que le
kétoprofène est le médicament le moins nocif, alors que l’indométacine et le
piroxicam sont les plus à risques.
INTERACTIONS MAJEURES |
|
- anticoagulants oraux - héparines - ticlopidine TICLID® - clopidrogel PLAVIX® |
majoration
de l’action anticoagulante de ces derniers, qui eux risquent de faire saigner
les lésions induites par les AINS |
- lithium |
en
diminuant son excrétion rénale, les AINS exposent à un surdosage en lithium |
- autres AINS |
Majoration
des effets secondaires |
- méthotrexate
|
Augmentation
de sa toxicité hématologique par réduction de son élimination rénale |
INTERACTIONS MINEURES |
|
-
diurétiques |
Majoration
du risque de survenue d’une insuffisance rénale aiguë |
- IEC |
|
- b bloquants |
Diminution
de leur efficacité |
-
ciclosporine |
Majoration
de sa toxicité rénale |
INTERACTIONS PROPRES A LA
PHENYLBUTAZONE |
|
- sels d’or |
Risque
accru d’aplasie médullaire |
- phénytoïne |
Risque
de surdosage en phénytoïne |
- sulfamides
hypoglycémiants |
Risque
hypoglycémique accru |
-
ulcère
gastroduodénal en évolution
-
insuffisance
hépatique ou rénale sévère
-
grossesse
et surtout dernier trimestre
En
dépit de leurs similitudes pharmacologiques, tous les AINS ne partagent pas les
mêmes indications, en raison notamment de la différence entre leur rapport
bénéfice-risques qui reflète leur inscription sur liste I ou II, ou leur
absence d’inscription.
Schématiquement,
on peut considérer 4 grands groupes :
1.
La
phénylbutazone (liste I)
Son
utilisation est dévolue aux accès microcristallins et aux poussées aiguës des
rhumatismes articulaires ou aux spondylarthropathies inflammatoires, après échec des autres AINS moins nocifs
2.
Autres
AINS de la liste I
Utilisation
dans le traitement des affections rhumatologiques douloureuses ou invalidantes
type arthrose, tendinite…
3.
AINS
de la liste II
En
plus des indications précédentes, ils peuvent être utilisés dans des
indications extra-rhumatologiques telles que :
-
la
traumatologie : utilisation dans les entorses
-
pour
le traitement d’affections douloureuses ou inflammatoires en :
o
ORL et stomatologie : otites, douleurs dentaires..
o
Gynécologie : dysménorrhée…
o
Néphrologie : coliques néphrétiques
-
Et
dans les états fébriles
4.
AINS
hors liste
Plusieurs
AINS faiblement dosés peuvent être utilisés sans ordonnance pour le traitement
d’affections douloureuses et/ou fébriles. Il s’agit de :
-
l’aspirine
-
l’ibuprofène
-
le
kétoprofène