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Auteur : Patrick
LEDIEU Médecin gériâtre, Hôpital Nord de Clermont-Ferrand
Document Mis à jour Octobre 2001 |
Fonctions dites « supérieures » chez l’homme, les capacités cognitives et la mémoire en particulier sont étudiées par de nombreuses disciplines : anatomie, biochimie, neurologie, psychologie, psychanalyse, philosophie…C’est de la mémoire que dépendent les connaissances, la personnalité, l’histoire et le comportement de l’individu et c’est aussi la mémoire qui est une des premières préoccupations lors de l’avancée en âge.
Cognition = « ensemble des processus psychiques aboutissant à la connaissance ».
Terme relatif à la mémoire
+ fonctions complexes associées :
- Activités perceptivo-motrices (gnosies, praxies)
- Activités verbales (langage)
- Activités organisatrices (raisonnement et jugement)
Le vieillissement cognitif « normal » (ou physiologique) est décrit sous le terme de Déclin cognitif lié à l’âge (DSM IV) ou « Aging Related Cognitive Decline »(ARCD) :
ð Critères = déclin subjectif progressif de plus de 6 mois + baisse objective des possibilités intellectuelles dans divers aspects de la cognition.
F Quel est l’enjeu ?
Les troubles de mémoire ressentis par le sujet -la « plainte mnésique »- ou rapportés par un tiers (famille, entourage), sont fréquemment rencontrés lors du vieillissement normal et font redouter le début d’une maladie neurovégétative : il s’agit pour le praticien de savoir distinguer les changements cognitifs liés à l’âge de ceux faisant craindre le début d’une pathologie démentielle. Savoir rassurer dans le premier cas ; savoir mettre en œuvre une prise en charge précoce dans le deuxième.
1. Physiologie
A l’échelle neurobiologique et histologique, le vieillissement cérébral (ou système nerveux central) est marqué par la diminution du nombre des neurones corticaux associée à une atrophie du cortex cérébral, la raréfaction de la substance blanche et la diminution de certains neurotransmetteurs. Les fonctions sensitives et motrices centrales sont peu modifiées par l’âge, par contre il existe globalement une augmentation du temps de réaction et une réduction modérée des performances mnésiques.
Certaines structures cérébrales mises en jeu dans le fonctionnement de la mémoire ont pu être isolées. Schématiquement, le parcours de l’information est celui-ci (Cf Coupe cérébrale en annexe):
Organe des sens
ð Aire sensorielle primaire (encodage)
ð Néocortex associatif (intégration partielle)
ð Système lymbique (circuit de Papez) à la face interne du lobe temporal (mémorisation et rappel)
ð retour au Cortex (stockage)
NB : La mise en évidence à la TDM (et surtout à l’IRM) cérébrale d’une atrophie du lobe temporal interne est un signe en faveur d’une maladie d’Alzheimer dont le mode d’entrée principal est la plainte mnésique.
On admet qu’il existe un vaste ensemble de circuits, génétiquement déterminés au début de la vie, et que l’apprentissage correspond à la stabilisation de certains circuits avec amputation progressive du potentiel de départ.
La création du souvenir correspondrait à une facilitation au niveau de certains neurones qui présenteraient une activité électrique différente selon le type d’information (augmentation du nombre d’axones, de récepteurs, de la quantité de neurotransmetteurs…).
En période d’apprentissage : on sait qu’il existe une synthèse protéique accrue, accompagnée d’une augmentation du métabolisme énergétique cérébral et des débits circulatoires sanguins locorégionaux (mécanismes sur lesquelles certaines thérapeutiques prétendent agir : cf paragraphe 5).
Certains neuromédiateurs jouent un rôle prépondérant dans la mémoire et font l’objet d’autres recherches thérapeutiques :
- Acétylcholine
- Catécholamines
- Dopamine
- Sérotonine
2. Définitions
a) Les systèmes principaux de mémoire :
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ð ð
¬ Mémoire visuelle ¬ Mémoire primaire ¬ Mémoire épisodique
¬ Mémoire auditive ð Mémoire de travail ¬ Mémoire sémantique
¬ (Mémoire olfactive) ¬ Mémoire procédurale
¬ (Mémoire gustative) ¬ Système de représentation
¬ (Mémoire tactile) perceptive
La mémoire sensorielle
Mal connue, c’est une mémoire dite ultra-courte. Le meilleur exemple est celui de l’impression de l’image sur la rétine : l’information est saisie en moins de 1/10 de seconde et n’est pas toujours consciemment perçue (Ex : message visuel ou auditif subliminal).
La mémoire à court terme (ou primaire ou immédiate) :
De capacité limitée, elle permet un maintien temporaire des informations : moins d’une minute. Elle est destinée à la manipulation d’une information pendant une tâche en cours (Ex : conversation ). Elle participe ainsi au raisonnement, la compréhension, l’apprentissage, le calcul...
L’exemple de la capacité de cette mémoire est celui de l’« Empan mnésique » = un individu est capable de saisir simultanément 5 à 9 éléments (7 en moyenne).
Ex : numéro de téléphone que l’on peut restituer tout de suite après l’avoir entendu.
Actuellement, on parle plus de la mémoire de travail impliquée dans l’accomplissement de nombreuses tâches du quotidien.
La mémoire à long terme (ou secondaire) :
Elle permet de conserver une quantité illimitée d’informations pour une durée indéterminée (de quelques minutes à plusieurs années).
Mémoire des faits récents ou antérograde ; mémoire des faits anciens ou rétrograde.
Elle comprend 4 types de mémoire .
La mémoire procédurale est dite implicite (« savoir comment ») ; les mémoires sémantiques et épisodiques sont dites explicites (« savoir que »).
ü La mémoire procédurale :
Elle intervient dans l’apprentissage de nombreux types d’habiletés comportementales et cognitives et met en jeu des aptitudes évoquées inconsciemment.
Ex : - la conduite automobile : l’apprentissage implique d’abord la mémoire explicite avec un effort d’acquisition puis devient automatique, impliquant la mémoire implicite.
ü La mémoire sémantique :
Elle correspond à la culture générale : acquisition et rétention d’informations sur le monde en général et l’organisation de nos connaissances sur les mots, les concepts et ce, indépendamment du contexte spatio-temporel.
ü La mémoire épisodique :
C’est la mémoire des évènements personnels - mémoire autobiographique -, remis dans un contexte spatial et temporel. Cette mémoire est d’autant meilleurs qu’elle est chargée d’émotions.
Les plaintes mnésiques concernent surtout la mémoire épisodique.
ü Le système de représentation perceptive :
Il rend possible l’identification visuelle (la reconnaissance) à travers les 5 sens.
b) Les différents stades de la mémoire :
fjjjjjjjj¬ Temps |
Evènements |
Stades |
T0 |
Expérience de l’événement L’événement doit être retenu |
Encodage |
T0 - Tn |
Maintien de l’information |
Stockage |
Tn |
L’information retenue est rappelée |
Evocation |
L’encodage (= acquisition, apprentissage) est un processus actif : on ne peut se souvenir que si l’information a été bien comprise (signification), que les liens avec d’autres informations sont nets (association), si elle est hiérarchisée (organisation) et située dans un contexte précis spatio-temporel (indexation) . L’information est encodée de façon rationnelle ou/et affective. L’encodage est soumis à l’attention (voir paragraphe 3).
Ex : Mémoriser un citron : c’est un fruit, rond mais plus petit qu’une orange, de couleur jaune il évoque le soleil ; de saveur acide ; il accompagne le poisson ; j’adore la tarte au citron etc…
Le stockage (= conservation) est d’autant meilleur qu’il existe une réactivation par de nouvelles informations : soit une même information est encodée plusieurs fois et on parle de consolidation (un adage nous dit que pour bien savoir un cours, il faut l’apprendre 7 fois !) ; soit une information différente vient se télescoper avec une première information et on parle de reconstruction (Ex : confondre deux évènements assez proches).
Remarque : le sommeil jouerait un rôle dans la consolidation des informations.
L’évocation (= restitution, rappel) est facilitée par les indices, le contexte.
Exemple : « Epreuve de mémorisation des 5 mots »
On propose au sujet de retenir une liste de mots : cheval, navet, boulanger, géranium, tournevis. On lui demande de les lire et de retenir le nom de l’animal, du légume, du métier, de la fleur et de l’outil.
On demande alors de citer les mots lus (c’est le rappel libre).
Pour faciliter le rappel d’un mot, on peut aider avec un détail, appelé indice = « il y avait un nom de fruit » (c’est le rappel indicé).
c) L’attention :
L’attention (et l’émotion) conditionne la qualité de l’encodage de l’information.
On distingue :
L’attention soutenue : c’est la capacité à se concentrer sur une tâche et à l’effectuer sans perdre de vue son but.
L’attention sélective : elle permet à l’individu d’ignorer certaines informations inutiles au profit de l’information essentielle.
III. ASPECTS CLINIQUES DU VIEILLISSEMENT NORMAL
1. La mémoire
Globalement, il existe un ralentissement des vitesses d’exécution des procédures mentales.
a) Les systèmes de mémoire
Ÿ La mémoire sensorielle (visuelle surtout) ne subit que des changements minimes avec l’âge (dans la mesure où il n’existe pas d’atteinte de l’organe sensorielle : cataracte, DMLA…).
Ÿ La mémoire de travail (court terme) ne semble pas affectée pour certains auteurs mais pourrait bien être altérée pour d’autres, notamment dans les tâches complexes, certainement en lien à des difficultés attentionnelles. En particulier, la personne âgée présente des difficultés à réaliser plusieurs tâches à la fois.
Ex : Oubli de la casserole sur le gaz si elle reçoit un appel téléphonique.
Ÿ Atteinte marquée de la mémoire à long terme et essentiellement sur la mémoire épisodique +++ (effet lié au type d’information et à la manière dont elle a été acquise) :
La mémoire épisodique de la personne âgée manque de précision, principalement sur les faits les plus récents, mal consolidés car il existe une difficulté à acquérir de nouvelles informations. Pour les faits plus anciens, il y a une tendance à la reconstruction ( mélanger deux évènements personnels par exemple).
Lorsqu’on pratique des tests d’évaluation de la mémoire, on constate une différence lors des épreuves de rappel libre : il existe un déclin précoce à partir de 40 ans et nettement accentué avec l’avance en âge. Par contre la facilitation du rappel, par l’indiçage, est efficace (contrairement au patient Alzheimer).
Ex : Dans l’épreuve de mémorisation des 5 mots, si le sujet âgé « normal » restitue difficilement les mots (en rappel libre), normalement le rappel indicé « il y avait un nom de fleur » va l’aider à retrouver le mot « géranium ». Le malade Alzheimer ne le retrouvera pas.
La mémoire procédurale ou la mémoire sémantique semblent être très peu affectées par le vieillissement normal.
b) Les stades de la mémoire
Ÿ Difficultés au niveau de l’encodage, moins efficace :
La personne âgée va traiter l’information de façon superficielle, sans stratégie. Il existe une diminution du pouvoir d’imagination, une baisse de l’attention, une moins grande disponibilité pour les évènements nouveaux.
D’autres part, tendance à ne se rappeler que de ce qui fait partie des centres d’intérêt.
· Peu de différence dans la dynamique de stockage :
La vitesse de l’oubli est semblable chez le sujet jeune et le sujet âgé. (Rmq : le stockage est très altéré dans la plupart des atteintes cérébrales organiques).
· La mémoire d’évocation serait déficiente :
Le sujet âgé met plus de temps à retrouver une information retenue dans sa mémoire que le sujet jeune. Nécessité des indices.
Ex : « Test des fluences » (cf BEC 96 épreuve n°5, en annexe)
On demande de citer le plus de noms d’animaux en 1 minute : ok si au moins 12 noms trouvés.
2. L’attention
L’attention « simple » ne paraît pas perturbé avec l’âge, par contre l’attention soutenue est moins performante.
Ex : difficulté à suivre plusieurs conversations à la fois, à effectuer des taches complexes qui nécessitent le maintien d’un attention sélective.
3. Le langage
Les perturbations retrouvées avec l’âge sont surtout liées au contexte : diminution des possibilités attentionnelles, fatigabilité, perte d’audition, évitements de situations sociales…
La compréhension écrite peut être modifiée dans certaines situations complexes (ex : double négation dans une phrase), due certainement à l’affaiblissement de la mémoire de travail.
Les troubles de la compréhension orale sont étroitement liées à la longueur, la rapidité et le mode de présentation ainsi qu’au contexte (bruit, stress…).
Dans tous les cas, le déficit de la compréhension est associé à la capacité mnésique de l’individu.
Certaines fonctions du langage se stabilisent voire s’améliorent avec l’âge : test de vocabulaire (définitions des mots…). Il existe aussi une meilleur capacité de narration que les sujets jeunes.
4. Les fonctions visuospatiales
On les teste par la reproduction ou la reconnaissance de figures (Cf BEC 96 épreuve n° 9, en annexe).
Le dessin, l’assemblage des pièces d’un puzzle, l’identification et la discrimination d’images sont affectés par le vieillissement normal.
5. La formation des concepts
Les capacités de conceptualisation et d’abstraction semblent altérées chez le sujet âgé.
Ex : L’utilisation de l’échelle visuelle analogique ou EVA (réglette destinée à estimer la douleur du patient avec laquelle il chiffre lui-même l’intensité en déplaçant le curseur) est rarement possible chez le sujet âgé : il est souvent incapable de projeter la douleur ressentie sur cet outil extérieur, trop abstrait.
6. L’apprentissage
Diminution globale des capacités d’apprentissage (apprentissages linguistique, moteur, comportemental et instrumental) liée au retentissement des processus cognitifs, à l’altération de la mémoire de travail et de l’attention.
Difficultés à apprendre des choses nouvelles.
IV. EVALUATION COGNITIVE
1. Intérêt de l’évaluation :
ü Distinguer les trois entités cliniques définies actuellement (Cf annexes p 11 et 12):
Œ Le « déclin cognitif lié à l’âge »
Le « déclin cognitif léger » ou Mild Cognitive Impairement (MCI)
NB : 55 % de ces sujets évoluent à 2 ans vers une démence contre 5 % des sujets normaux, d’où l’intérêt de dépister ce stade « pré-démentiel ».
Ž La démence de type Alzheimer (DTA).
ü Donner une réponse à la plainte mnésique du patient (70% des patients de plus de 70 ans se plaignent de troubles de mémoire : cf p 14) ou de son entourage.
Œ Soit la plainte n’est pas objectivée par les tests : on rassure et on réévalue à distance (6 mois, 1 an).
Soit la plainte est objectivée par les tests :
F Si l’atteinte est transitoire ou mineure mais stable et ne retentit pas sur l’autonomie : on parlera de déclin cognitif lié à l’âge (ou oubli lié à l’âge).
F Si l’atteinte évolue et retentit sur l’autonomie :
- On cherchera une autre cause que la démence (Cf en annexe : les facteurs…).
- S’il existe d’autres troubles cognitifs associés : on évoquera une démence débutante.
2. Les tests psychométriques :
ð L’altération des performances cognitives est objectivée par différents tests neuropsychologiques et retenue lorsque « les scores sont inférieurs à 1,5 écart-type de la moyenne de la population du même âge et de même niveau socioculturel, en l’absence de causes médicales organiques ou psychiatriques ».
Il existe de nombreux tests psychométriques, indispensables à toute démarche diagnostique. Certains sont effectués spécifiquement par les neuropsychologues, d’autres sont utilisés par les neurologues, psychiatres ou gériatres. Parmi les plus utilisés, citons :
ü BEC 96 (= Batterie d’évaluation cognitive en 96 points) (Cf en annexe) :
Ce test explore les activités mnésiques (épreuve de rappel, d’apprentissage, d’orientation), les activités organisatrices (manipulation mentale, problèmes, fluence), les activités verbales (dénomination) et les activités perceptivo-motrices (visuo-construction).
Tout score inférieur à 9 pour chacune des 8 épreuves traduit un déficit pathologique.
Un score total inférieur à 80 est pathologique.
ü Le TMA (= Trail Making Test A) (Cf en annexe)
Il évalue la rapidité perceptive. Il est également considéré comme une épreuve d’attention concentrée.
Le principe consiste à relier les cercles en suivant l’ordre numérique : le temps pour le réaliser est chronométré.
Notes standardisées : 10 (T < 25 sec) jusqu’à 1 (T > 151 sec).
ü Le MMS (Mini Mental State de Folstein) (Cf en annexe).
Ce test ne permet pas de dépister la population « MCI ». Il permet grossièrement de dépister et coter un trouble cognitif avéré.
Un résultat > 26 ne permet pas d’éliminer une démence débutante : il faut pratiquer des tests plus fins.
On parle de démence légère pour un MMS entre 20 et 26, démence modérée entre 10 et 19, démence sévère si il est < 10.
V. PRISE EN CHARGE
1. Approche pharmacologique :
Il existe de nombreuses molécules proposées dans « certains symptômes du déficit intellectuel du sujet âgé ». En pratique, ils n’ont pas fait la preuve de leur efficacité.
Citons :
F Les psychostimulants :
Adrafinil (OLMIFON*)
F Les dopaminergiques :
Piribédil (TRIVASTAL*)
F Les vasodilatateurs :
Piracetam (GABACET*, NOOTROPYL*)
Dérivés de l’ergot (ISKEDYL*, SERMION*, VASOBRAL*)
Extrait de ginkgo biloba (TANAKAN*)
F Il est surtout primordial de garder à l’esprit les médicaments reconnus pour avoir un effet négatif sur la cognition :
- Psychotropes (neuroleptiques, anxiolytiques, hypnotiques…)
- Antihypertenseurs à action centrale, β bloquant, digoxine..
- Antiparkinsoniens
- Antalgiques de pallier II et III de l’OMS.
- Antiépileptiques
2. Approche non pharmacologique :
Face à la plainte mnésique attribuée à un déclin cognitif, le principe de prise en charge repose sur les thérapies visant à élaborer des stratégies adaptatives compensatrices permettant d’optimiser les performances et la fonction mnésique.
§ Les petits moyens :
- Utilisation de procédés mnémotechniques (+ pour mémoire épisodique), développement de stratégies d’apprentissage (utiliser des indices, travailler l’attention…).
- Développement de stratégies d’organisation logique : aide-mémoire, ranger les objets dans un lieu qui rappelle leur fonction…
§ Techniques de stimulation cognitive et stratégies éducatives dans le cadre d’ « ateliers mémoire » :
Elles sont basées sur la notion de réserve cognitive (= il existe chez les personnes âgés un potentiel d’apprentissage qui se réfère à tout ce qu’elles ont connu et qui peut s’améliorer) et sur le concept de plasticité cérébrale (effet positif des stimulations cognitives sur l’organisation du cerveau…). Il existe en outre une stimulation liée à l’effet groupe.
La baisse des performances cognitives, constatée chez le sujet âgé normal, n’est pas retrouvée chez tous les sujets âgés. Cette hétérogénéité tient aux facteurs socioculturels, psychologiques et médicaux propres au patient ainsi qu’aux conditions de passation des tests.
Ex : On tiendra compte du niveau d’étude, du terrain anxieux, de l’affaiblissement liée à une pathologie évolutive, des troubles sensoriels…
Les processus cognitifs sont interdépendants : un trouble mnésique peut perturber le raisonnement, une baisse d’attention ou un trouble sensoriel peuvent affecter le processus mnésique.
Les plaintes mnésiques ne reflètent pas obligatoirement des difficultés réelles. Pourtant il est aujourd’hui indispensable de pratiquer une évaluation à l’aide de tests psychométriques au cours d’une « consultation mémoire » ou d’un bilan gériatrique :
- pour conclure à la bénignité des troubles et rassurer le patient et la famille, avec possibilité d’établir un projet thérapeutique en vue d ‘améliorer la qualité de vie de la personne âgée.
- pour dépister des signes d’alertes (MCI) et organiser le suivi de la personne âgée dans l’hypothèse de l’évolution vers une authentique maladie d’Alzheimer.
Les progrès de la neuropsychologie et la neurobiologie permettront de mieux cerner encore les mécanismes physio-pathologiques mis en jeu dans la cognition et de dépister plus finement les groupes à risques.
VII. BIBLIOGRAPHIE
NASR-WYLER A. : « Le vieillissement cognitif normal ».
La Revue de Gériatrie, 1998, 23(2), 11-17.
SKA B. : « La variabilité interindividuelle dans les modifications cognitives liées à l’âge ». In Vieillir avec succés, L’Année Gérontologique 1997, 97-105.
THOMAS-ANTHERION C. : « Vieillissement cognitif et maladie d’Alzheimer : peut-on faire la différence ? ». Gérontologie Pratique, 2000, 120, 12.
PETIT H. : « La mémoire et ses troubles en médecine générale ». Rhône-Poulenc,1998.
« Mémoire et oubli ». IPSEN, 1998.
Du sujet âgé normal à la DTA légère
Agés normaux...
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MCI (MMS > 26) |
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DTA légères (MMS < 24...) |
* Petite baisse du rappel libre, de la mémoire de travail et de la rapidité de réponse (fluence, codes) * Rappel indicé normal * Aucune atteinte frontale * Plainte mnésique * Surface hippocampique diminue de 5% à partir de 65 ans * Métabolisme glucidique normal |
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* Plainte de mémoire et déficit aux tests neuro-psychologiques, déficit du rappel libre différé ++ (1 à 2 DS) avec efficacité correcte de l’indiçage * Tests chronométriques touchés * Fonctions attentionnelles : petite atteinte frontale * Le langage est normal * Comportement (IADL, ADL = Normaux) * Echelles globales N (MMS, ADAS) |
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* Rappel libre différé effondré avec perte de l’efficacité de l’indiçage * Langage et praxies touchés * Début du retentissement comportemental (IADL, ADL) |
COMPARAISONS ENTRE
PLAINTES ENONCEES LORS D’UNE MALADIE D’ALZHEIMER
ET VIEILLISSEMENT PHYSIOLOGIQUE
(par ordre décroissant)
Maladie d’Alzheimer
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Vieillissement physiologique
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* Divergence entre le récit du patient et du référent * Oubli du nombre et des noms des petits-enfants, hors contexte * Difficultés à s’orienter dans des endroits connus * Apparition de fautes d’orthographe (agraphie lexicale) * Difficultés à faire certains papiers * Oubli de pan entier de souvenirs * Perte d’un hobby de façon récente * Difficultés à suivre un film, lire un livre * Changement de caractère |
* Difficultés à faire deux choses à la fois (doubles tâches) * Sensibilité aux interférences * Perte du fil de la pensée * Difficultés à se concentrer * Plainte centrée sur une activité sociale : bridge, langue étrangère,... * Difficulté à inhiber des habitudes anciennes (ancien rangement,...) * Oubli des noms propres, fautes d’orthographe attentionnelles * Aucune des plaintes de la colonne ci-contre |
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70 % des sujets de plus de 70 ans se plaignent de leur mémoire |
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6 sur 10 ont des tests normaux |
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î |
4 sur 10 ont des tests altérés |
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Chez 2 sur 10, l’altération est due à l’anxiété ou à une dépression |
í |
î |
Chez 2 sur 10, il existe une maladie organique |